J’étais sur mon retour de ma ride aujourd'hui. Un petit 60 kilos sur terrain vallonneux. Un beau samedi d’octobre à 12 degrés C. La saison des gros efforts est comme terminée. Les sorties de club? Bof, non merci pour moi. À ce temps-ci de l’année, je préfère rouler avec des amis(e) proches ou seul. Habillé multicouches, en long, avec mon passe-montagne léger, je n’ai comme plus le goût de m’époumoner pour m’accrocher à personne.
Je venais de lâcher un rang pour embarquer sur le boul. Fossambault, une petite nationale qui revient sur Québec presque directement à la hauteur de chez moi. Je déborde de bonheur. Je roule au train à 75 %. C’est le régime que j’aime bien rouler seul. De toute façon, tard à l’automne de la sorte, habillé chaudement, on dirait que tout est difficile. Je ne sais pas si c’est le froid, le fond de l’air, toujours est-il que tu sembles donner un bon effort sur un segment de route que tu fais des centaines de fois et tu regardes ton odomètre pour t’apercevoir que tu ne roules qu’à 30-32 alors qu’en temps normal tu vogues ordinairement ici à 34-36 facilement. Vous n’avez pas cette impression vous autres? En tout K!
Enfin, je suis sur ce boulevard direction sud et il y a plein de rangs empruntés par les cyclistes qui débouchent sur cette nationale. Ils arrivent du comté de Portneuf plus à l’Ouest ou bien des campagnes du Nord de la ville. À 300 m devant moi, il en sort un et il m’aperçoit lorsqu’il doit regarder sur sa droite pour surveiller le trafic qui vient. Plutôt que de prendre son temps comme un gros « Buck » qui veut montrer la majestuosité de son panache à sa femelle, me laisser remonter vers lui question de voir si je ne pourrais pas être un coéquipier pour quelques kilos, monsieur prend la poudre d’escampette. C’est sérieux son affaire! À voir le rythme de son coup de pédale, son dos bien penché par en avant, c’est clair qu’il n’est pas parti à 75 % lui là!! Kossé que je fais me suis-je dit? Bof, écoute Bob, pousse un peu. Augmente la cadence, puis tu verras. Qui sait? C’est peut-être juste un pétard mouillé ce mec-là après tout! Un gros pétard par exemple, bien je veux dire costaud. Pas bedonnant pantoute, mais costaud. Je n’ai pu le voir comme il faut quand il est sorti du rang, mais de loin, mon œil aiguisé me disait qu’il était d’une silhouette pas mal plus costaude que moi et surtout, plus jeune que moi aussi. Toutes les conditions gagnantes pour que je ne le rattrape jamais. Même s’il me distance quelque peu, que j’augmente le rythme jusqu’au max que je peux donner, je sens que je n’y parviens pas. Bon, qu’est-ce que je fais? Je ne me viderai tout de même pas comme cela pour rien. Bon! Je vais me laisser une dernière chance. Il y a à l’avant à 2 kilos la montée de la rivière aux pommes, une petite bosse de 1 kilo, 5 degrés d’inclinaison qu’il faut bien gérer si on veut la terminer avec force. Plus abrupte sur le bas, son long faux plat sur le haut peut devenir interminable si on en a trop gaspillé en bas. S’il me largue là, bien chapeau mon homme, tu m’auras bien eu, petit connard! Je l’ai toujours en vue. Je suis revenu sur lui un peu. 250 m peut-être? Est-ce que je vais payer cher cet effort pour me rapprocher de lui? On verra »/$%. Je le vois vraiment attaquer la côte. Son gestuel ne ment pas. Les épaules saccadées, le coup de pédale presque désespéré. C’est certain qu’il ne veut pas me voir lui! Je décide de monter à mon rythme. Bien accoté aussi, mais sachant qu’il faut qu’il m’en reste en haut pour relancer le faux plat sur la grosse plate. Je réduis la distance de moitié finalement et lorsque je reprends de la vitesse, l’espoir renait en moi. Ehhhh, mon BOB ne lâche pas! Qui sait si dans le faux plat descendant l’autre bord, il ne décidera pas de relâcher la pédale? Toi? Tu te sens bien non? Top shape mon Bob! Let’s Go alors! Çà passe ou ça casse.
HEIN! Mais qu’est-ce qu’il fait? Bien cimonac, il se range en haut dans une espèce de dead end, met le pied à terre, boit, fait comme si de rien n’était…Comprends-tu que je ne le regarde pas plus qu’il ne faut, je maintiens mon rythme et même davantage pour lui montrer qu’il a drôlement bien fait d’arrêter parce que j’allais le chercher moé là!!! Chuis passé devant lui comme un coup de vent! Dans mon livre à moi, il a eu la chienne le jeune! Trop orgueilleux. Plutôt que de poursuivre sa fuite, faire ce qu’il avait voulu faire, ce gars-là a préféré se sortir lui-même pour ne pas vivre un échec! Bien oui! Il n’y a pas d’autres raisons. Finalement, je me retourne après l’avoir dépassé pour savoir quel rythme adopté moi-même, je venais de vider la tank pas mal, qu’il rembarque sur sa bécane pour me suivre. Bien joualvair! Je continue donc à rouler bien accoté, question de lui montrer que si je suis remonté sur lui, c’est parce que je ne suis pas un manchot et qu’à ce rythme, ce petit jeu peut durer longtemps. Je suis surpris de ne pas l’entendre en arrière de moi ou qu’il se soit décidé de ma passer. D’un léger coup d’œil arrière, je le vois à 10 m en arrière, mais je ne peux pas me prononcer sur sa vitesse. Je me méfie alors. Au moment que nous entamions le dernier long faux plat avant de descendre vers Québec, le kid me dépasse rapidement. Il est assis. Il me dépasse à une vitesse égale. Il avait bien pris son rythme. À une vitesse qu’il savait sans doute trop élevée pour que je m’accroche. À un rythme que parfois des amis me font et puis après ils me disent. « Ah je prenais le relais voyons Robert !!» Va chier calvaire! Tu n’apprendras pas à la gazelle à faire des grimaces mon colon!
Toc Toc! En un temps de le dire, cette décision s’est prise instantanément dans ma tête. Il n’avait pas pris 5m en avant de moi, que je rajoutais deux dents sur un coup de rein en danseuse pour me recoller à lui. Cela n’a pas été facile. Pas question de me rassoir tant et aussi longtemps que je n’y suis pas parvenu. Pas grave si je m’effoire et que ne peux pas. Ce ne sera pas la première fois que je me ferai avoir sur une attaque sournoise. Je suis capable d’en prendre des défaites de la sorte. Je réussis toujours à trouver du positif dans toutes mes expériences. C’est pour cela qu’à chaque fois je m’essaye lol!! Je finis par lui arriver dans le cul espérant que je pourrai récupérer un peu! Il sent ma présence. Comme un cheval checkant de côté il m’aperçoit! Il accélère. Il met toute la gomme dans ce fameux faux plat! Non, mais croit-il qu’il va m’avoir parti comme c’est là!!?? La chaîne en bas, j’ai les jambes qui brûlent. Fuck il ne m’aura pas. Je vois qu’il faiblit. Super alors! Je sens mon rythme cardiaque et ma respiration reprendre du mieux avant qu’on arrive sur la longue descente. Pas question de prendre le relais pour qu’il me refasse la même passe. Il se rabaisse sur son vélo comme Froome le tabarouette et à la grosseur qu’il a, il prend nettement plus de vitesse que moi. Je dois pédaler, Sa draft ne me suffit pas! 50/12, je suis au maximum de mon développement. Je tourne les manivelles à 115 et je finis par me recoller à lui en bas le temps qu’il doive gérer une bretelle d’autoroute…qu’est-ce que je fais? Je le passe ou pas? Nonnnnnn. Écoute, c’est lui qui est le plus jeune, le plus costaud, qui a constamment voulu te décrocher après tout! Qu’il mange de la mard…Allez mon homme. As-tu encore du jus? Envoye! Montre-moi cela! HEIN! Quoi encore, avant d’entreprendre le dernier bout le fun sur cette nationale pour rentrer en ville, mon kid me fait signe qu’il tourna à droite. Eh! Une entrée d’une cabane à sucre. Ce n’est même pas une route! Mon gars qui me refait la même passe que tout à l’heure. En virant, il me regarde tout sourire, je le regarde aussi, mais contrairement à d’habitude où on dit ordinairement « eh ! Merci! ou what ever d’autre, je garde un visage sans émotion, je ne le salue même pas et je continue sur le rythme qu’il m’imposait juste pour lui démontrer qu’il avait drôlement bien fait de s’arrêter, parce qu’il aurait été obligé de diminuer, de me parler et force est d’admettre qu’il n’était pas préparé à cela. Pas fort son affaire!!
Je suis rentré à la maison sur le rythme que j’avais avant de le rencontrer et je me suis pris une bonne bière à sa santé chez moi.
Après toutes ces années à vélo, j’ai rencontré toutes sortes de cyclistes sur les routes. Je ne vous les énumérerai pas toutes, parce qu’il y a plusieurs sous-catégories dans tous les styles que je pourrais vous décrire, mais je dirais qu’on pourrait tous les classés dans deux grands ensembles; il y a ceux qui donnent le show et il y a ceux assistent aux shows. Normalement, et la plupart du temps, les bons shows mans finissent par gagner beaucoup de courses et de défis. Normal. Ils sont forts, ils sont confiants, ils ont du caractère et ils sont capables de rebondir. Parfois, ceux qui assistent aux shows, la catégorie dont je fais plus souvent partie, peuvent surprendre s’ils sont intelligents et s’ils sortent dans le bon moment. Aujourd’hui, j’ai rencontré quelqu’un qui aime donner un show ou à tout le moins, qui a tenté de le faire, mais malheureusement, il n’a pas donné un bon show! Pendant que je vous écris, j’ose espérer qu’il fait un examen de conscience.
P.S. Ces petites histoires de l'auteur peuvent sembler très prétentieuses de sa part, mais elles ne sont rédigés que dans l'optique de distraire le lecteur, quoiqu'elles sont empreintes des réalités du cyclisme compétitif sur route. On y retrouve toujours une sorte de leçon ou des conseils qui peuvent servir à celui ou celle qui détecte le message.
Coach BOB la gazelle!
--------- __o
------- _-\ <,' Aussi
un rouleur!
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Encore en feu...j'ai bien fait de sortir de mon bord. Mais on se reprend la semaine prochaine.
RépondreSupprimerE. Tremblay
:-) lol
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